Laurent Drelincourt

(1625-1680)

 

Livre premier - Sonnet 13

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Sur la vieillesse

 

1                                 Pauvre homme dont la force est la force d’un verre,
2                                 Vieillard faible et tremblant, à toi-même ennuyeux (†),
3                                 A qui tant d’ennemis font ensemble la guerre –
4                                 Ne veux-tu point songer à quitter ces bas-lieux ?

5                                 Ne sens-tu point la mort qui te suit, qui te serre ?
6                                 As-tu perdu l’esprit ? Et ton cœur vicieux,
7                                 Endurci par les ans, et tenant à la terre,
8                                 N’a-t-il ni  mouvement, ni chaleur pour les cieux ?

9                                 Vois ces monts sourcilleux, dont les cimes chenues (§)
10                               Portent leur front de neige à la hauteur des nues,
11                               Et dont le sein répand un déluge de feux.

12                               Ainsi, pour t’élever à la gloire éternelle,
13                               La neige sur le poil, le cœur brûlant de vœux,
14                               Corrige ta froideur, par le feu de ton zèle.


(†) déplaisant

(§) chenu : qui est tout blanc de vieillesse. En style poétique, on le dit des montagnes couvertes de neige.

Annotations de Drelincourt :

Ligne 1 : « C’est un pot cassé », et « la vieillesse est une couronne d’orties », disent les Juifs.

Ligne 12 : Ce sont les trois montagnes d’Islande : Helga, Hécla et la Croix.

Ligne 13 : « La montagne est devenue neige », disent les rabbins, en parlant d’une tête blanche. « Que ta vieillesse blanchisse des cheveux blancs de la sagesse et des bonnes œuvres, et qu’il ne s’y trouve aucune noirceur de péché. » (Saint Augustin). « La vieillesse a assez d’autres laideurs, n’y ajoute point celle du vice. » (Caton)

 

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