Laurent Drelincourt

(1625-1680)

 

Livre premier - Sonnet 2

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Sur la divinité

 

1                                 Elève-toi, mon âme, et d’un vol glorieux,
2                                 Va dans le plus haut ciel, contempler l’invisible,
3                                 Le monarque infini, plus grand que tous les cieux,
4                                 La première beauté, l’être incompréhensible.

5                                 C’est lui qui toujours est, sans jamais être vieux,
6                                 C’est lui par qui tout est, à qui tout est possible ;
7                                 Qui, sans changer de place, est présent en tous lieux ;
8                                 Et dont tout l’univers est l’image sensible.

9                                 Eternel, trois fois bon, trois fois grand, trois fois saint,
10                               Que le ciel même adore, et que la terre craint,
11                               Fais que je t’aime autant que je te vois aimable.

12                               Que t’ayant ici-bas contemplé par la foi,
13                               Quelque jour, au sortir de ce corps périssable,
14                               J’entre dans ton palais, pour être tout en toi.

 

Annotations de Drelincourt :
Ligne 4 : Simonide ayant demandé terme sur terme (*), pour dire ce que c’était que Dieu, répondit enfin que plus il y pensait, plus il y trouvait de difficulté.
Ligne 5 : Dieu se qualifie « celui qui est, qui était, et qui sera », c’est-à-dire l’Eternel ; or l’éternité n’a point de temps, et celui qui ne peut naître n’a point d’âge. (Tert.)
Ligne 11 : La raison d’aimer Dieu, c’est Dieu même, et la mesure de l’aimer, c’est de l’aimer sans mesure. (Bern.)

 

(*) délai sur délai ; l’histoire est rapportée par Cicéron dans son traité De la nature des dieux, livre second, paragraphe XXII : « Si tu me demandais ce qu’est un dieu ou quel il est, je suivrais l’exemple de Simonide : Hiéron, tyran de Syracuse, lui ayant posé précisément la même question, il sollicita un jour de réflexion, le lendemain deux jours et quand il eut ainsi à plusieurs reprises doublé le temps qu’il déclarait nécessaire à la recherche, Hiéron, surpris, finit par lui demander l’explication de tous ces retards : « C’est, dit-il, que plus j’y pense, plus la question me paraît obscure. » Je crois que Simonide - il n’était pas seulement d’après ce qu’on rapporte un poète charmant mais aussi un homme instruit et plein de sagesse - après que beaucoup d’hypothèses ingénieuses et subtiles se furent présentées à son esprit, n’arrivant pas à voir avec certitude laquelle était la plus vraie, désespérait de trouver une solution satisfaisante. »

 

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