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1 Nature, prête-moi tes plus noires couleurs,
2 Fournis, pour mon tableau, le sang d’une panthère,
3 Le venin d’un dragon, le fiel d’une vipère,
4 D’un crocodile, enfin, et l’écume et les pleurs.
5 Je veux peindre, aujourd’hui, l’artisan des malheurs,
6 Le lion, le serpent, le monstre sanguinaire,
7 Qui nous fit tous mortels, en tuant notre père,
8 Et par lui nous causa d’éternelles douleurs.
9 Il nous ouvrit la voie aux infernales flammes,
10 Et ce bourreau cruel, et des corps et des âmes,
11 Détruisit, d’un seul coup, le bonheur des humains.
Annotations de Drelincourt :
Ligne 5 : Le prince des démons, qui sont en si grand nombre que selon saint Jérôme, quand ils n’auraient que les corps des plus petits oiseaux, ils couvriraient le soleil.
Ligne 10 : On dit qu’il bat et qu’il meurtrit horriblement les sauvages. Les Chinois, et d’autres peuples d’Orient et d’Occident, l’adorent par la crainte qu’ils ont de sa cruauté. La haine qu’il porte à Dieu (dit saint Augustin) l’anime contre la pauvre créature humaine. Il tâche de venger sur l’image le tort qu’il croit avoir reçu de l’Original.
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