Dans le cinquième chapitre des Consolations, Charles Drelincourt s’intéresse à la mort physique des croyants et à la manière dont la victoire du Christ s’étend à eux.
La mort fait partie de la condition humaine depuis la chute ; elle exprime l’effet du péché. A cet égard, Dieu traite différemment le corps de l’homme et son âme ; celle-ci est lavée alors que le corps est détruit. La mort abolit ainsi les restes de notre corruption.
Pourquoi les croyants doivent-ils passer par là ? Drelincourt invoque trois raisons : la résurrection corporelle est une démonstration éclatante de la puissance de Dieu ; elle met sur un pied d’égalité les croyants de l’ancienne et de la nouvelle alliance, et, surtout, elle nous conforme à l’image du Fils qui a lui aussi connu la mort.
La mort a perdu de son éclat depuis la résurrection du Fils, qui l’a vaincue pour nous et qui continue à la vaincre en nous. Tel un chef d’armée, il est attentif à notre lutte, il nous revêt de son Esprit et de ses armes et il désarme la mort, en lui enlevant son dard, la malédiction de la loi.
Il n’est donc pas étonnant que la mort des chrétiens est différente de celle des autres hommes, malgré les apparences. Elle n’attaque que leur extérieur et n’atteint pas l’âme, et même l’abandon du corps n’est pas une victoire définitive de la mort, car un jour, les enfants de Dieu retrouveront leur corps, dans un état parfait. En ce sens, la mort physique peut être comparée à l’abandon d’une position par un guerrier qui se replie, pour un temps. Drelincourt estime qu’à certains égards, le corps est comme une prison pour l’âme, et il va jusqu’à dire que « nous … contemplons [la mort] avec un ravissement de joie ». Au fond, pour lui, il ne faudrait pas parler d’une « mort » des croyants, car pour eux, c’est le début d’une vie. Tout au plus est-elle une espèce de sommeil ; lors du jugement, les croyants sortiront indemnes de la mort, et celle-ci se verra définitivement anéantie.
Ainsi les trois aspects de la mort, « la corde à trois cordons que le diable avait filée pour en étrangler les hommes », sont traités par l’œuvre du Fils : à la croix il nous a racheté de la mort éternelle ; en faisant son Esprit œuvrer en nous, il nous vivifie ; quant à la mort corporelle, il en a enlevé l’amertume et nous a délivré de toutes nos frayeurs.
Drelincourt clôt le chapitre en annonçant qu’il approfondira tous ces aspects dans la suite de son ouvrage.
Il nous semble que ce chapitre cinquième sonne très juste, dans son ensemble. L’explication des raisons de la mort même des chrétiens est à la fois concise et lumineuse. La présentation de la mort des croyants de la nouvelle alliance paraît également très équilibrée, même si certaines formules sont peut-être un peu trop triomphalistes ; dire que la mort est pour le chrétien un « ravissement de joie » paraît excessif.
A noter aussi l’usage abondant et très intéressant de l’Ancien Testament. Drelincourt illustre bon nombre de ses affirmations en utilisant des passages narratifs de l’Ancien Testament. Il y a là un début d’allégorie, mais le pasteur de Charenton ne tire jamais des conclusions extravagantes ou abusives et reste assez sobre. Cette façon d’utiliser l’Ancien Testament, si elle flirte avec l’allégorie, semble donc tout à fait acceptable.
NB : A titre de curiosité, on peut signaler l’interprétation toute physiologique du chapitre 12 de l’Ecclésiaste, à la fin du premier paragraphe du chapitre. Comme on le voit à travers les fils de Charles, à la maison Drelincourt on cultivait deux sciences : la théologie et la médecine.
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